À l'annexe Gambetta du lycée Lamoricière, à Oran, en classe de 6e, Yves Gaillard rencontre un collaborateur de génie, Daniel Debauge. Yves et Daniel seront dans les mêmes classes de la 6e à la 2e.
Yves Gaillard et Daniel Debauge se découvrent une même passion pour la bande dessinée. Leur étonnant potentiel imaginatif les mène à une belle collaboration: ils commencent à écrire des aventures de leur héros Johnny, l'enfant de la prairie, à les dactylographier et à les illustrer, parfois avec l'aide d'autres camarades de leur âge, Jean-Paul-Jouary et François Michel-Lopez.
«Nous avions 14 ans, Yves et moi, écrit Daniel Debauge. C'est en 4e et en 3e que nous y avons travaillé le plus. En 2e, nous avions dû nous "calmer", vu les résultats scolaires désastreux de l'année précédente. C'est donc essentiellement au lycée que nous préparions tout ça: en récréation, en permanence (nous étions demi-pensionnaires) et même pendant certains cours ennuyeux. Il se peut que j'aie envoyé des textes à Yves dans cette période lorsqu'il était en vacances en France (je me souviens d'une adresse aux Houches, en Savoie). Après le départ définitif en France nous sommes restés un moment en relations épistolaires, mais nous n'avons plus travaillé ensemble sur des bandes dessinées ni sur quoi que ce soit...»
Engagés dans une intense production de scénarios, ils décident de créer un journal, Wigwam: Daniel se charge de la rédaction des scénarios, Yves du dessin. D'autres camarades, comme Jean-Paul Jouary, participeront ponctuellement. Ce journal d'adolescents très prometteur, fait à la pâte à polycopier, durera l'espace de quatre numéros, le matériel employé se révélant vite défaillant.
Un mini-livre dont il ne reste que des vestiges épars devait sans doute être inséré dans le numéro 5 du journal Wigwam : Bud et l'épave du Granger, sur un scénario et des dessins signés Jean-Paul Jouary.
Sont encore conservés:
— Deux livrets dactylographiés
«Je me rappelle bien ce scénario (c'est moi qui avais eu l'idée de la tête de mort avec une torche à l'intérieur), écrit Daniel Debauge, mais je ne me souvenais pas qu'il avait été dactylographié... Peut-être l'a-t-il été après? Je l'ai trouvé assez bien écrit et soigné, par rapport à nos œuvres antérieures. Le scénario lui-même avait été terminé, mais probablement pas la dactylographie (qui demandait plus de travail matériel, avec les moyens de l'époque). Ce qui m'amuse, maintenant, c'est que nous nous démarquions de quelques tabous de la littérature enfantine de l'époque: nos histoires sont jonchées de cadavres et les héros engloutissent des litres de whisky!»
— Neuf scénarios manuscrits originaux dont les héros sont
— Un livret de vers intitulé Souvenirs de demi-pension comptant quatre pages. Ce feuillet fut diffusé en 1961 parmi les lycéens de l'annexe Gambetta du lycée Lamoricière, à Oran. René Patouraux, condisciple de Daniel Debauge et d'Yves Gaillard, a réussi à conserver intact ce document rarissime (il n'existe plus en effet qu'en un seul exemplaire), pendant 46 ans !
— En 1961,Yves et Daniel entreprennent d'écrire leur grande tragédie «grecque» (en alexandrins) intitulée: Xymoléhon. Des vestiges des actes II et III ont été retrouvés dans les archives de Daniel Debauge (l'acte I est probablement perdu, et l'acte IV n'a jamais été écrit).
«Chronologiquement, écrit Daniel Debauge, Xymoléhon vient après Wigwam et les bandes dessinées. Nous étions un peu plus grands, en fin de la 3e, peut-être début de la 2e. Il faut la lire comme une parodie de ce qu'on nous enseignait à l'époque, en français. C'était bien construit, puisque nous avions fait le plan de la pièce et la liste des personnages. Je l'avais commencée avec Yves, qui avait rédigé une partie de l'acte I et peut-être de l'acte II. Yves était passé à autre chose, j'avais continué un peu tout seul, puis m'étais probablement découragé au milieu de l'acte III. Nous avions énormément rigolé en écrivant cela!»
En 1962, à 16 ans, Daniel Debauge et Yves Gaillard quittent l'Algérie et arrivent en France. Le premier ira vers l'ouest, à Albi puis Toulouse, l'autre vers l'est, à Fréjus.
Séparés depuis 1962, Yves et Daniel continueront à correspondre. De 1962 datent les planches les plus anciennes de Mystère sur Crazyland, projet d'album sur un scénario génial dont le héros était Johnny, le cowboy solitaire. En 1963, à partir du scénario de Mystère sur Crazyland écrit par Daniel, Yves commence une nouvelle version plus soignée. |
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Le dernier scénario écrit par Daniel Debauge, Le Proscrit de Lonely Valley, est très élaboré: sur les indications scénaristiques très précises de Daniel Debauge, Yves Gaillard entame les premières planches. À cause de la diaspora, l'éloignement, ce travail, malheureusement, demeurera inachevé. |
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